MRIRIDA N´AÏT ATTIK Y LOS CANTOS DE LA TASSAOUT



Aguadora en el lago Izourar

"¿Cómo encontraré tiempo para soñar en el amor?
El grano está por moler, las vacas para ordeñar,
el cántaro en la fuente, la comida en el fuego.
La jornada es demasiado corta para todas las tareas.
Hay hierba en los campos y madera en el bosque,
el pan está cociéndose y la ropa en el río.
Muerta de cansancio me derrumbo por la tarde.
El alba está aún lejos cuando me levanto.
Se ha hecho de noche hace tiempo cuando me acuesto.
¿Cuándo tendré tiempo de soñar en el amor?"

Los cantos de la Tassaout
Mririda n´Aït Attik 



Hay en el Alto Atlas marroquí, al este de Marrakech, excavado por el río Tessaout, un valle que se remonta hasta el M'Goun, una de las más altas cumbres de la cadena (4070 m). En este hermoso valle de difícil acceso, las tradiciones de los pueblos bereberes (chleuh) han sido capaces de mantenerse intactas.
Aquí nació a principios del siglo XX, una chica llamada Mririda. ¿Era este su verdadero nombre? Ella misma siembra la duda  en uno de sus poemas:

Me apodaron Mririda, Mririda, Mririda, ¡la rana ágil de los prados!


Su suerte fue la de muchos bereberes, pronto casada, madre, obligada a los penosos trabajos en los campos, al acarreo del agua.
Pero esta chica analfabeta, sin cultura literaria, tenía un don, el de percibir la belleza de este país chleuh y de sentir todo lo que emanaba tanto de las piedras como del alma o las pasiones de sus habitantes.
Poco más sabemos de su biografía. René Euloge, que la descubrió en 1927-28 confiesa que todas sus investigaciones para saber más acerca de su vida fueron infructuosas.
Cuando oyó hablar de ella por primera vez, esta chica había dejado el valle y se había convertido en una chirat o tamedant, una especie de  trovadora que iba de zoco en zoco. No era precisamente una belleza a pesar de sus enormes ojos y su expresiva mirada. Sus rasgos duros daban a su rostro de piel clara una emotiva expresión. Sin embargo, Euloge, en el prologo de Canciones de Tassaout añadió:

Todavía recuerdo a Mririda envuelta en su amplia capa de lana fina, antigua y admirable andir aferkachène, a rayas carmesís, escarlatas y negras. Adoptaba  poses hieráticas, sin sospechar su gracia y majestad, hermosa como una lira cuando levantaba sus brazos espléndidamente torneados rodeados de pesados brazaletes de plata. Su pelo abundante, tan negro que tenía reflejos de color antracita, enmarcaba un rostro expresivo de delicada  tez que hubiera merecido para nuestra poetisa el dulce nombre de Amaryllis...

Los bereberes, al igual que sus primos los tuareg, miran y escuchan a los narradores y cantantes, pero no fue suficiente para que nuestra poetisa puediera vivir "decentemente". Por eso se convirtió en prostituta, y para el deleite de sus amantes que "ella elegía cuidadosamente", como cuenta una de sus más antigua amigas.
Se estableció, tal vez por casualidad o por la importante guarnición militar en ese momento, en Azilal, pueblo importante de la vertiente occidental del Alto Atlas.

Al volver a la región en 1946 después de la guerra, Euloge trató de saber más sobre la vida y el destino de Mririda. En Azilal, todo en el zoco había cambiado. Pero no Mririda. En el valle, sus preguntas son mal interpretadas y las bocas permanecen cerradas, los recuerdos parecen haberse borrado de la memoria. No hay duda de que la causa es la reprobación de la forma de vida de Mririda. Allí encontró a una "colega" de nuestra poetisa que le comentó que Mririda había sido la esposa temporal de un ayudante de los Goums, después de un sargento. Luego se perdió su rastro. Y el resto de su vida es un completo misterio.
Sin duda, estos datos son más bien escasos para una biografía. Sí, ¡pero ay!, ¿sabemos mucho más sobre el ilustre Homero? Qué importa quién es el autor si nos quedan sus obras, para éste la Odisea, para aquella sus Cantos de la Tassaout. Canciones hermosas (que recitaba, al parecer, arrastrando el final del verso), poemas maravillosos, bellos aún en su traducción al francés y que aún deben ser más sonoros y más expresivos en tachelhaït.
Casi doscientos poemas, unos cortos, otros más largos, pero todos llenos de amor a su tierra, de descripciones de la vida de los chleuhs, y también poemas de amor, con sus alegrías y sus tormentos.


"Llegando desde un mundo lejano, he aquí los Cantos de la Tassaout. Llegan a nosotros como esas interminables humaredas acules, exhalando perfumes de tulla y de pino, que en la tarde se elevan hasta los rincones más olvidados del Valle del Alto Atlas, tan lejano a pesar de encontrarse a las puertas de la vieja Europa. Es mi vivo deseo que mi interpretación no haya desfigurado en exceso su belleza natural, anónima y sin embargo tan personal..."

René Euloge, Anglet 1959













Azou

Azou, le bien aimé si bien nommé,
Comment pourrais-je te résister encore?
Si mes yeux sont pour toi le silex à étincelles,
Ne vois-tu que la poudre est prête à s'enflammer
Et que je dénoue devant toi mes tresses noires?
Entre, referme la porte, et pousse le verrou…
Trop longtemps je fus insensible à ta voix.
Pourquoi m'affliger en me parlant de cadeaux,
Puisque je veux te faire oublier ma cruauté?
Je te donnerai tout ce que tu peux désirer.
A toi ma langue fine et mes lèvres humides,
A toi l'étau de mes jambes croisées!
Qu'importe si d'autres voient mes tatouages cachés!
A eux je me vends, mais à toi je me donne.
Désormais, Azou, tu es seul en mon cœur.
Qu'attends-tu pour ouvrir ma ceinture? 
Azou, bien-aimé, prends mes lèvres,
Nos bouches resteront confondues,
Nos deux corps ne feront plus qu'un
Et nos deux cœurs seront dans la joie!


Azouou

…Azouou, Brise du Soir, si bien nommée,
Seras-tu donc toujours cruelle avec moi?
De ta porte, jamais je ne m'éloignerai
Jusqu'à ce qu'elle ouvre ou que je périsse.
Tes yeux sont pour moi le silex à étincelles
Et tes lèvres entr'ouvertes sur tes dents blanches
M'attirent vers elles et me fascinent.
Ton sein a la rondeur des pêches d'Assermoh,
Ta peau la douceur du duvet de la palombe,
Tu as un petit tatouage bleu entre les sourcils,
Celui-ci au menton et ceux-là aux chevilles.
Et les autres, les verrai-je jamais, Azouou ?…
Défais ta chevelure sur tes blanches épaules;
J'y cacherai ma tête comme la palombe sous son aile.
Pourquoi me repousser chaque jour sans pitié?
Quelle prière, quels cadeaux peuvent te fléchir?
Ta voix me pénètre et fait fondre mon cœur
Et tes hanches, en marchant, font monter mon désir…
O Brise du Soir ! Quelle crainte te retient?
Si tu me prêtes tes lèvres rouges
Tes lèvres humides te resteront…
Si tu me laisses prendre ton corps,
Ton corps assouvi sera encore à toi…
Et nos deux cœurs seront dans la joie!


La fibule

Grand-mère! grand-mère! depuis qu'il est parti,
Je ne songe qu'à lui et je le vois partout…
Il m'a donné une belle fibule d'argent,
Et lorsque j'ajuste mon haïk sur mes épaules,
Lorsque j'agrafe le pan sur mes seins,
Lorsque je l'enlève, le soir, pour dormir,
Ce n'est pas la fibule, mais c'est lui que je vois !
Ma petite fille, jette la fibule et tu l'oublieras
Et du même coup tu oublieras tes tourments…
…Grand-mère, depuis bien des jours, j'ai jeté la fibule,
Mais elle m'a profondément blessé la main.
Mes yeux ne peuvent se détacher de la rouge cicatrice,
Quand je lave, quand je file, quand je bois…
Et c'est encore vers lui que va ma pensée!
Ma petite fille, puisse Dieu guérir ta peine!
La cicatrice n'est pas sur ta main, mais dans ton cœur.


C'est toujours ainsi en ce bas-monde...

Il y en a toujours un au-dessus,
Il y en a toujours un en-dessous
Et c'est toujours ainsi en ce bas-monde
En haut, la fortune. En bas, le déshérité.
En bas le faible. En haut, la force, la force...
Et c'est toujours ainsi en ce bas-monde...
Le mortier est fait pour recevoir le pilon
Comme l'enclume est faite pour les coups de marteau.
La meule dormante subit la meule tournante.
Le mulet ploie toute sa vie sous le bât.
La terrasse est bien lourde à la poutre qui la soutient.
Et le bon plaisir du Cadi pèse lourd lui aussi...
De grâce, n'allez pas lui chanter ma chanson!
Bonnes gens, n'ai-je rien oublié?
Et la femme qui est toujours sans défense!
La femme! La femme qui est toujours dessous...


Mélopée de la fileuse

Tourne, tourne mon fuseau,
Mon fuseau de bois fin et poli,
Tourne de plus en plus vite,
Si vite que tu échapperas à mes yeux...
Tourne! tu n'auras pas à ralentir
Car mes doigts agiles te nourriront
Au gré de ton tourbillon
Et ne me demanderont pas grâce...
Tourne, tourne, mon long fuseau!
Enroule le blanc fil soyeux
La douce laine qui excelle pour la trame...
Tourne, tourne, mon petit fuseau!
Enroule le blanc fil solide,
La rude laine qui réclame la chaîne...
Blanche toison, enroule-toi
Pour le bien des gens de la maison!
Ne vous brisez pas, longs fils blancs,
Ni maintenant ni plus tard sur l'ensouple
Quand ma fille passera trois fois sous le métier...
File, file plus vite entre mes doigts,
Blanche laine qui alourdit mon fuseau!
Pour la maisonnée, y a-t-il bien plus précieux
Que la laine et le grain, que le grain et la laine?
Ô Laine blanche, grise ou noire,que ta bénédiction soit sur nous
Avec le secours du Dieu clément et miséricordieux!


Dieu n'a pas fait de place à la rose

... Ma soeur, étrangère au pays, ne t'étonne pas,
Ne t'étonne pas de mon ignorance:
Mes yeux n'ont jamais vu ni rose ni orange...
On dit qu'il y a, en bas, au bon pays
Où gens, bêtes et plantes n'ont jamais froid.
Ma soeur étrangère venue de la plaine
Ne ris pas d'une fille de la montagne
Vêtue de laine grossière et allant pieds nus.
Dieu n'a pas fait de place à la rose,
Dieu n'a pas fait de place à l'orange
Dans nos champs et nos pâturages...
Jamais je n'ai quitté mon village et ses noyers
Je ne connais que l'arbouse et les rouges cenelles
Et l'humble touffe de basilic vert
Qui éloigne de moi les moustiques
Lorsque je m'endors sur la terrasse
Quand sont trop chaudes les nuits d'été...


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